Cession Entreprise : comment structurer et rédiger une clause d'earn out ?
Dans le cadre d’une opération de cession-acquisition d’entreprise, lorsqu’il existe une différence de valorisation entre l’acheteur et le vendeur, les deux parties peuvent recourir au mécanisme de l’earn out. Il s’agit d’une clause de l’acte de vente qui prévoit le versement d’un complément de prix en fonction des performances futures de la cible. Alors, comment bien construire financièrement une clause d’earn out qui prend en compte le potentiel de la cible et les objectifs des deux parties ? Voici les points à prendre en considération lors de la rédaction d’une clause du complément de prix !
Le montant, la durée et le mode de calcul de l’earn out
Évidemment, le montant du complément du prix est l’élément le plus important d’une clause d’earn out. Généralement, il représente 10 à 15 % du prix de vente, sauf cas particulier (renouvellement d’un contrat-clé par exemple) . L’obligation de paiement est déclenchée par l’atteinte des objectifs, ou la réalisation des conditions, fixés dans le contrat .
Notez que le complément de prix peut être variable. Dans ce cas, il faut convenir d’un mode de calcul qui satisfait les deux parties.
Par ailleurs, il n’existe pas de durée fixe pour la clause d’earn out. Le cédant et le cessionnaire bénéficient donc d’une grande liberté contractuelle et peuvent fixer la durée qu’ils jugent appropriée. Cependant, sauf cas particulier, plus la durée est longue, plus l’aléa est élevé pour le vendeur.
Distinguer complément de prix et acquisition en plusieurs étapes
L’earn out vise un complément de valorisation des titres déjà cédés (le vendeur cède 100% du capital à un prix de 1000 à la date de réalisation de l’acquisition mais faisant l’objet d’un complément de prix futur de 100 sous conditions lui permettant potentiellement de porter le prix à 1100). En cas d’insolvabilité future de l’acquéreur au moment où le complément de prix est dû, le vendeur est en risque sur son complément de prix uniquement.
L’earn out n’est donc pas similaire à une acquisition en plusieurs tranches comportant des prix spécifiques à chacune des portions du capital successivement vendues (par exemple 90% vendus immédiatement à un prix de 900 pour 90% et 10% dans un an pour un prix potentiellement de 200). Dans ce cas, si l’acquéreur est devenu insolvalble, le vendeur n’a vendu qu’une partie de son capital.
Dans le cas de l’earn out, l’aléa porte donc uniquement sur le prix final alors que dans l’acquisition en plusieurs étapes l’aléa porte sur l’acquisition du solde ET la valeur de ce solde.
Les éléments déclencheurs du complément de prix
Il existe de multiples indicateurs de performance (KPI) pouvant servir de base pour déterminer et déclencher l’earn out. Il s’agira le plus souvent d’éléments comptables permettant d’assurer la performance financière de la cible et de déterminer si les objectifs convenus ont été atteints ou non.
Les indicateurs retenus doivent être objectifs et pertinents. Ils doivent également refléter de manière sincère les performances convenues. Plusieurs éléments peuvent être retenus :
- Le chiffre d’affaires ;
- La marge brute ;
- L’excédent brut d’exploitation (EBITDA)
- Le résultat d’exploitation
- Tout autre solde de gestion convenu entre les parties et correspondant à un solde de gestion dont la définition est usuelle ou à un solde de gestion spécifique (solde de gestion usuel puis retraité d’un ceratin nombre d’éléments).
Par ailleurs, du fait que l’atteinte des objectifs permettant de déclencher le complément de prix est déterminée sur la base des états financiers à venir, il est primordial de préciser les pratiques comptables et les méthodes qui seront utilisées pour élaborer les futurs états financiers.
Un complément de prix peut être parfois lié aussi à un événement externe convenu entre les parties : signature d’un contrat spécifique avec un client, obtention auprès d’un client ou d’un tiers d’une qualification spécifique pour la société, etc …
Les conditions de l’earn out
Lors de la rédaction d’une clause d’earn out, assurez-vous d’inclure toutes les conditions que vous jugez essentielles pour atteindre les objectifs financiers permettant de déclencher le complément de prix.
Bien entendu, il est nécessaire d’avoir un droit d’accès, voire d’audit ou de contrôle, sur les comptes de références afin de pouvoir vérifier l’exactitude des calculs en fonction des indicateurs retenus. Par ailleurs, soyez très attentif aux conditions proposées par l’acheteur et assurez-vous qu’elles ne vont pas nuire à votre fonction au sein de l’entreprise.
En fonction du profil de l’acquéreur (industriel ou financier) et de l’autonomie laissée à la cible postérieurement à son acquisition, le complément de prix sera plus ou moins aisé à construire : plus l’intégration est poussée dans un groupe industriel, plus il est difficile de suivre les performances de la cible post acquisition, plus l’acquéreur a de liberté de gestion durant la période visée par l’earn out plus il est compliqué de considérer que la société fonctionne en autonomie avec les performances qui lui sont propres.
L’earn out n’est donc pas recommandé dans toute opération.
Bon à savoir :
L’earn out est une façon souvent habile de conclure des négociations difficiles entre des parties qui ne parviennent pas à converger sur une valorisation de l’entreprise.
Pour autant, la rédaction et la mise en œuvre d’une clause d’earn out sont des tâches complexes qui méritent une attention très particulière. Il est primordial de prévoir l’intervention d’un cabinet de conseil indépendant qui pourra vous aider à identifier, évaluer et suivre l’évolution de tous les éléments pris en compte dans la clause et qui travaillera en étroite coordination avec l’avocat en charge de la rédaction de la clause.